Anesthésie au chocolat
Pessa'h 1991 ou 1992.
L'ère des réformes est arrivée pour l'Union Soviétique
et ses satellites. Pour ce qui reste des communautés juives, cela signifie
le droit de revenir à une vie juive traditionnelle, d'éduquer
les enfants dans les chemins de la Torah. Les leaders religieux ressortent de
l'ombre, parfois de prison, des visiteurs banalisés redeviennent des
rabbins ou des émissaires des communautés du monde libre, des
écoles s'ouvrent, des Mikvés construits dans des caves, sous des
trappes, affichent leur existence…
Dès les premiers stades du retour à l'éducation juive surgit
la question de la circoncision. Il est impensable d'éduquer des enfants
sans leur en parler et surtout être à même de répondre
à la demande. Des milliers de juifs se posent la question, des centaines
de milliers se la poseront bientôt. Nourrissons, enfants adultes…
Sortis de la clandestinité, les Mohalim locaux ne sont pas toujours à
même de répondre à la demande.
Paris,
1993, collection personnelle.
De Petersbourg à Paris:
Génia, Roman, Igor, Ifim et les autres, devenus Binyamin, Réouven,
Israël Haïm...
Une
heure après la circoncision du dernier, tous souriants. Demain, ils seront
à la tour Eiffel!
Au second rang 2ème à gauche, le Rav Chalom Mandel Kalmenson
Pessa'h 1991 ou 1992.
L'histoire que je vais vous raconter, je n'en ai été que le témoin.
Un groupe de jeunes et moins jeunes, puisque les parents faisaient partie du
voyage, était venu en région parisienne pour tourisme et ... circoncision.
Le jour dit, mes confrères m'ont invité à assister aux
diverses interventions qui ont consacré l'entrée (le retour!)
dans la communauté d'un dizaine d'impétrants de tous âges.
Extraordinaire journée, s'il en fut, que de voir tant de jeunes et d'adultes
accepter avec plaisir une circoncision qu'ils attendent depuis plusieurs mois
ou années.
Extraordinaire émotion comme celle du Rav Guerchon Lieberman, de mémoire
bénie. Un honorable vieillard sorti lui même de ces enfers nazis
ou soviétiques, qui étreignait et bénissait les enfants
avant la circoncision.
Une
de ces circoncisions m'a laissé un souvenir inoubliable.
Le petit bonhomme avait sept ou huit ans. C'est sûr qu'il avait accepté
d'être circoncis. C'est sûr qu'il s'était allongé
de lui même sur la table d'opération. Mais l'odeur du bloc opératoire,
la vue des seringues de l'anesthésiste et des instruments du Mohel lui
avaient soufflé … de ne plus être d'accord. Malgré une anesthésie
locale rondement menée, le gamin pleurait toutes ses larmes, et aurait
ameuté le monde entier si …
Si un des assistants n'avait pas sorti de sa poche une tablette de chocolat.
En un instant, tout fut rentré dans l'ordre, et la Brit Milah put commencer.
Lorsque j'eus l'occasion de raconter cet étrange mode anesthésique
à un ami de retour de l'ex Union Soviétique, il me conta que là
bas, on complétait l'anesthésie en confiant à l'enfant
un Game Boy!
contacter Aharon Altabé
www.milah.fr ----- Mise à jour